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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


de donner une date exacte. Mais Picquart insista. Henry finit par dire que c’était peu après son retour de permission, en octobre[1]. « Écrivez, Messieurs les juges, dit Picquart ; consignez cette date : à cette époque, Leblois n’était pas rentré à Paris ; vous l’entendrez, vous me confronterez avec Gribelin. »

Mais les juges s’en gardèrent, et Picquart ne fut confronté ni avec Gribelin ni avec Lauth. Leblois fut entendu contradictoirement avec Henry, mais la question de la date, qui emportait le reste, ne fut pas posée à nouveau ; et Leblois ne la souleva pas, pour n’avoir point à dire à des officiers qu’il avait passé ses vacances en Allemagne. Le débat porta sur le point de savoir si le dossier secret « se trouvait » sur la table de Picquart quand Leblois était venu voir son ami (à une date indéterminée). Henry l’affirmait ; Leblois dit qu’il n’en savait rien, qu’il fallait le demander à Picquart. Henry, prudent, sans faire aucune mention de la pièce Canaille de D…, dit que Leblois avait certainement vu une grande enveloppe avec les mots : « Dossier secret » ; Leblois le nia formellement[2], réclama un supplément d’enquête ; Pellieux et Tézenas s’y opposèrent.

L’honorabilité d’Henry et de Gribelin « rendait leur témoignage inattaquable[3]. » Les menteurs, c’étaient Leblois et Picquart.

  1. Procès Zola, I, 290 ; Cass., I, 206, Picquart.
  2. Le détail de cet incident entre Leblois et Henry devant le conseil de guerre a donné lieu, entre les mêmes témoins, à une nouvelle confrontation au procès Zola : « Henry, dépose Leblois, n’a pas parlé de photographies et n’a pas précisé la date ; il a dit qu’il y avait un dossier, une enveloppe sur laquelle se trouvait les mots « dossier secret » et il n’a pas dit qu’une photographie était sortie de cette enveloppe. » (I, 361.) « Leblois, déclare Henry, a dit que, devant mes affirmations précises, il ne pouvait pas me donner un démenti. »
  3. Instr. Fabre, 43, Pellieux.