Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 3.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
21
LE SYNDICAT


les enceintes législatives[1] ». La liste des chefs de l’entreprise est, depuis deux ans, aux mains du gouvernement[2]. Le gouvernement sait « grâce à quels subsides les commis-voyageurs en innocence » poursuivent leur besogne[3]. La France va-t-elle laisser salir, décourager, assassiner son armée ?

À première vue, nulle calomnie plus niaise, et nulle plus gratuite. Non seulement il n’y a pas de Syndicat, mais nul plan concerté : Scheurer ne connaît pas Picquart, que je n’ai pas vu depuis quatre ans ; il n’a dit à Ranc ni à moi le nom d’Esterhazy ; il a tenu Mathieu Dreyfus à l’écart ; je me suis rencontré, pour la première fois, avec Mathieu en octobre, avec Leblois la veille ; Picquart a appris par les journaux le recommencement du drame ; aucun de nous n’est en relations avec Rothschild. Mais, précisément, il était invraisemblable qu’une telle affaire eût été livrée au hasard. Au contraire, quoi de plus plausible qu’un nouveau crime des puissances d’argent ! Voilà des années que les mêmes gens habituent ce peuple à croire que tout est à l’encan sous la République, décorations, emplois, votes, secrets de la défense nationale, et qu’il n’est ni un fonctionnaire ni un législateur qui ne soit à vendre, pourvu que l’acheteur y mette le prix ! Dès lors, l’organisme intoxiqué de longue date absorbe comme de l’eau tous les poisons.

Celui-ci, le plus violent de tous, a été préparé par les Jésuites.

  1. Patrie du 26 novembre 1897.
  2. Dépêche du 24.
  3. Écho de Paris du 26.