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MORT DE LEMERCIER-PICARD


La logeuse affirma qu’elle n’avait vu personne entrer chez son locataire ; sans doute, un visiteur eût pu tromper sa surveillance ; mais sa chambre était voisine de celle du prétendu Roberty et elle n’y avait entendu aucune rumeur suspecte[1].

« Lorsque les talons d’un pendu touchent le sol ou une paroi », ils exécutent, dans les affres de l’agonie, « comme un rappel de tambour[2] ». Au moment de la première application du régime cellulaire à Mazas, quand les suicides des détenus s’y multiplièrent, « ce battement révélateur était bien connu des gardiens[3] ». Les médecins légistes recommandent de se renseigner, auprès des voisins d’un individu qui a été trouvé pendu ou étranglé, « s’ils n’ont pas entendu un bruit insolite sur le parquet[4] ». On négligea de poser cette question à la logeuse. Elle n’était point bavarde et cette affaire l’ennuyait. Le surlendemain, comme son mari

    vêtu, portant à la boutonnière le ruban de la médaille militaire. Les membres sont rigides et la mort paraît remonter à quatre ou cinq heures environ. Les bras pendent naturellement le long du corps, les jambes touchent le sol et sont légèrement ployées. Le défunt a le dos contre la fenêtre et la corde qui a servi à suspendre le corps est de force moyenne, servant à l’emballage des petits paquets. Cette corde en double est passée à deux reprises autour du cou et se termine par un nœud coulant. » — Instr. Bertulus, 5 mars 1898, Nolot : « Roberty était pendu à l’espagnolette de la fenêtre, à 1 m.50 environ au-dessus du sol. La tête était contre un des carreaux ; ses pieds touchaient à terre, ses genoux repliés. »

  1. Enquête du commissaire de police : Instr. Bertulus, femme Nolot. — Quand Lemercier-Picard fut identifié avec Leeman, son beau-frère déclara « qu’il n’avait pas supposé qu’il restât à ce triste individu assez de courage pour se suicider. Cela ne signifie nullement que je croie à un assassinat. » (Temps du 11 mars.)
  2. Brouardel, Cours de médecine légale, la pendaison et la strangulation, 47.
  3. Ibid., et rapport du docteur Jacquemin, médecin de Mazas.
  4. Ibid., 48.