Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1903, Tome 3.djvu/53

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LE SYNDICAT


sincérité criante, où Panizzardi, dès la première heure, rend compte à son État-Major que ni lui ni Schwarzkoppen n’ont connu Dreyfus). Alors, pour convaincre son interlocuteur, Henry ouvre son coffre-fort, en sort divers documents et les étale sur son bureau. D’abord, il commente le rapport d’un autre attaché militaire (ni l’Allemand ni l’Italien) « où il est question des rapports de Dreyfus avec un agent prussien (Schmettau) en Belgique[1]. Donc, l’intermédiaire n’est déjà plus Panizzardi. À ce moment, entre Gonse. Même dialogue. Même objection de Gonse (que Dreyfus n’a pas été en relations directes avec Schwarzkoppen), et même riposte de Paléologue. Henry, qui voit patauger Gonse, intervient, mais pour « couper court » à l’entretien. Il parle, « avec un certain trouble », des pièces qu’il a tirées de sa caisse pour les montrer à l’envoyé d’Hanotaux, mais il ne les montre pas[2].

Tout cela (les lettres de l’Empereur allemand, la prétendue lettre de Panizzardi, ces versions contradictoires, cet embarras) eût dû paraître suspect à Paléologue, diplomate informé, psychologue délicat, et d’esprit droit. Mais il estimait Gonse et croyait à l’impeccable loyauté du bon et rude soldat que lui paraissait Henry. Au surplus, il pensa que cette affaire était très embrouillée et n’éprouva pas le besoin d’en démêler les fils.

La seule pièce qu’Henry ait fait voir (ou qu’il ait lue) à Paléologue était le brouillon d’une note du colonel Schneider, attaché militaire autrichien. Ce brouillon, sans date ni signature, avait été ramassé à l’ambassade d’Autriche dans les premiers jours du mois d’octobre (1897),

  1. Cass, I, 563, Gonse.
  2. Cass., I, 390, Paléologue.