Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/141

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
131
DÉFENSE RÉPUBLICAINE


de Lebret, et tout aussitôt Dupuy, rien qu’en se taisant, fit tomber l’accusation contre Mercier.

V

Lasies fit passer au président une motion sur la mise en accusation de Dupuy, mais, Ribot ayant demandé la parole, il s’effaça devant lui.

Il y avait eu (entre autres) une faute à éviter : c’était de jeter l’affaire Mercier au travers de l’affaire Dreyfus. Ribot l’aggrava.

Une fois la question posée, la résoudre négativement, c’était contre Dreyfus ; autant le laisser à l’île du Diable.

Ribot ne dit que peu de mots, mais décisifs. Sur la forfaiture : « Je puis juger sévèrement la conduite qu’a pu tenir le général Mercier, peut-être moins sévèrement qu’elle ne l’a été tout à l’heure. » Sur la motion même de Dupuy : « Il s’agit d’une prérogative de la Chambre. La Chambre seule, devant qui les ministres sont responsables, a le droit de les mettre en accusation ; le gouvernement n’en a pas le droit. »

La question, nous l’avons dit, est complexe, controversable. Pourtant le scrupule de Ribot, en soi légitime, avait lieu d’étonner, après le long silence qu’il avait gardé devant tant d’autres illégalités et tant d’abus de pouvoir. Pourquoi accourait-il au secours de Mercier quand, jamais, il n’avait paru à la tribune pour Dreyfus ni pour la loi ? Les socialistes lui crièrent que « c’était la trahison