martyr, ni de châtiment assez terrible, de pilori assez infamant pour tous les ministres, civils ou militaires, qui ont accusé ou laissé accuser Dreyfus ; toutes les représailles seraient excusables, tous les supplices, légitimes[1] » ; et « la France, elle aussi, devrait porter la peine des crimes commis par ses généraux et par ses ministres ; les hommes de notre peuple devront demander pardon au peuple d’Israël… Il y a deux accusés aujourd’hui, et le premier, c’est la France, ses généraux, ses hommes d’État, son corps politique tout entier et, derrière, à de rares exceptions près, tout le corps social, tout le peuple[2]… Je ne peux que le répéter : si Dreyfus est innocent, les généraux sont des scélérats. Puisse l’écho de ces paroles aller jusqu’en Bretagne[3] ! » — Impossible de remuer plus profondément ce qu’il peut y avoir de limon dans le cœur de ces juges d’occasion, catholiques et soldats. Quoi ! ils condamneraient la France à demander pardon aux juifs ! — D’autre part, informé du bordereau annoté, et bien qu’il sût à quoi s’en tenir, il poussait Mercier[4], soit à le produire à l’audience, soit à y protester que Galliffet lui avait intimé de taire la preuve décisive du crime de Dreyfus, par crainte de l’Allemagne[5] ; qu’ainsi le procès n’était qu’une comédie, et que le conseil de guerre, dès lors, n’avait qu’à refuser de
- ↑ Discours du 6 juillet 1899.
- ↑ Discours du 31.
- ↑ Discours du 16.
- ↑ Voir p. 306.
- ↑ Discours du 31 juillet : « S’il me m’était pas démontré que Dreyfus est innocent, il n’est pas de crainte de guerre, pas de puissance au monde qui empêcherait de prononcer un verdict de condamnation. » — L’allusion est évidente.