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RENNES


que de savoir, par le menu, les antécédents de Cernuski.

Les rapports de Brücker avec Cernuski se bornèrent-ils à cette seule conversation ? C’est ce que raconte Brücker. D’autre part, selon Przyborowski, « Cernuski avait été présenté à l’État-Major par un officier allemand, ancien propriétaire d’un tattersall à Munich », et « il se rencontrait habituellement dans un café du boulevard Saint-Germain, près du ministère de la Guerre, avec Mareschal[1] ».

Nécessairement, dès que l’Affaire avait éclaté, Cernuski s’était mis avec les « patriotes », ce qui était une façon de passer pour honorable ; aussi bien, en sa qualité d’ancien officier de la Triple Alliance, il possédait des preuves certaines du crime de Dreyfus. Sa femme, désireuse de lui voir jouer un rôle, ne fût-ce que pour faire pièce à son père qui avait fait mettre sa dot sous séquestre, et « française dans l’âme », le poussa, surtout aux environs du procès de Rennes, à offrir son témoignage[2]. Lui résistait, alléguant qu’il serait expulsé, « à cause de l’émotion » que produirait son secret une fois connu, et, déjà, il était sans le sou, « manquant même de pain par moments » et devant à tout le monde

  1. Tribunal de Nice, 23 et 24 mars 1904. — Przyborowski précise qu’il n’a pas vu lui-même Mareschal avec Cernuski, mais « qu’il en a la certitude morale ». Le renseignement sur l’officier allemand qui aurait été l’intermédiaire entre l’État-Major et Cernuski lui vient d’une dame Winkler, « qui avait des relations avec beaucoup de personnages titrés et avait été expulsée de France ». — D’après Galmot (Petit Niçois du 13 mars 1904), qui prétend tenir le récit de Przyborowski, la première rencontre entre Cernuski et Mareschal aurait eu lieu, à Paris, dans un hôtel de la rue Lafayette, le même hôtel où Cernuski raconta qu’il reçut les confidences de l’officier allemand Schœnebeck. (Voir p. 472.)
  2. Procès Dautriche, 661, Montéran ; 666, Deglas : de même Quesnay, Écho de Paris du 3 juin 1900, la Déposition Cernuski.