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RENNES


voir vous aviser personnellement et directement avant que ma demande ne vous parvienne par la voie diplomatique et afin que vous puissiez prendre toutes mesures utiles pour que votre témoignage puisse être reçu dans le plus bref délai possible. » Et, comme il s’agissait d’une affaire d’État, il ne se contenta pas de s’adresser aux deux officiers, mais il télégraphia à leurs souverains, l’Empereur allemand et le Roi d’Italie : « Sire, j’ai l’honneur, au nom de la justice et de la vérité, de prier respectueusement Votre Majesté d’autoriser le colonel de Schwarzkoppen (ou le général de Panizzardi) à se rendre en personne devant le conseil de guerre de Rennes pour y déposer comme témoin. » Il signa : « Labori, avocat du capitaine Dreyfus. »

Logiques tous deux avec eux-mêmes, Demange ne participa point à ces tentatives et Mathieu y consentit (5 septembre).

Le 6, l’audience secrète pour Cernuski dura à peine quelques minutes.

Le prétendu héritier des rois serbes y arrivait parfaitement déshonoré, à la lettre mis à nu par la police et par la presse qui, depuis deux jours, reconstituaient, escroqueries par escroqueries, l’existence de ce demi-fou perdu de dettes[1]. Il en était fort troublé, ainsi que des lettres de menaces et d’injures qu’il recevait, pourtant ne pouvait pas reculer. Il prêta serment, donna, comme on récite une leçon, les noms qu’il n’avait pas voulu dire à l’audience, d’abord ceux de ses informateurs : le lieutenant de Schœnebeck et son compatriote Adamowitch, qui aurait reçu les confidences du conseiller aulique Mosetig ; puis, ceux des au-

  1. Notamment la déclaration de la colonie serbe de Paris : « L’individu en question, absolument inconnu dans les pays serbes… », les articles des journaux autrichiens, etc.