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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


l’un des premiers, produit l’annotation impériale dans une réunion publique à Suresnes[1] ; Jaurès essaya en vain de lui faire dire d’où lui était venu le texte de la note, toute cette imbécile histoire. Impossible de lui arracher s’il croit encore à la réalité, à l’authenticité « du document intéressant pour le pays » qui lui a été communiqué.

Un incident, dont Jaurès avait escompté un grand effet, fit tout à coup dévier le débat, transforma la conférence historique en une mêlée générale.

Jaurès, vers la fin de la première séance, en était arrivé aux aveux d’Henry. Il rappelle le mouvement de réveil et de révolte des consciences qui s’est produit au lendemain de la confession du faussaire. « C’est alors, dit-il, que, parmi les hommes qui ont crié aux machinateurs du faux : « Vous avez trompé le pays et vous nous avez trompés », on a pu voir celui qui avait conduit l’enquête sur Esterhazy, celui qui, au procès Zola, avait pris la parole au nom de l’armée avec le plus d’autorité et d’éclat » ; et il donne lecture de la lettre de Pellieux demandant à Cavaignac sa mise à la retraite : « Dupe de gens sans honneur, ayant perdu confiance dans ceux de mes chefs qui m’ont fait travailler sur des faux…[2]. » Cette lettre, qui n’a été communiquée ni à la Cour de cassation ni aux juges de Rennes, il la tient « de personnes qui ont vécu dans l’entourage du général et qui ont connu ses confidences désespérées ».

Le texte qu’en lit Jaurès n’est pas rigoureusement exact[3] ; surtout, il n’est pas entièrement inédit.

  1. Voir t. III, 397.
  2. Voir t. IV, 205.
  3. Le texte exact fut produit le lendemain par le général André ; c’est celui que j’ai donné au chapitre : La Mort d’Henry.