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L’ENQUÊTE


avec une égale noblesse dans les sentiments qui exaspéraient leur effroyable conflit…[1] »

C’était la première fois qu’un homme de son parti, après avoir combattu la Revision, rendait publiquement justice à ses adversaires, désavouait les accusations qui avaient été portées contre eux et qui avaient trouvé si longtemps le pays crédule. L’hommage pourtant venait trop tard pour que les partisans de Dreyfus en fussent touchés comme ils l’auraient été aux heures d’épreuve. Déjà même, ils avaient trop vaincu ; déjà, dans l’ardeur des nouvelles batailles où ils étaient engagés, plusieurs s’allégeaient des idées dont ils s’étaient réclamés, comme d’un fardeau trop lourd qui ralentit la marche.

VI

André, ayant achevé son enquête, en fit le rapport à Combes (19 octobre). Il exposa simplement ses principales constatations (pièces dissimulées, inexactement interprétées ou matériellement altérées), en signala la gravité, sans conclure, Combes se vit terminant cette longue lutte, en ressentit par avance beaucoup de fierté et transmit le rapport d’André au ministre de la Justice. Dreyfus, informé que l’enquête du ministre de la Guerre lui était favorable, rédigea sa requête en revision. Il l’appuyait sur les faux témoignages de Cernuski et de Savignaud, le bordereau annoté, la lettre que j’avais reçue du prince de Munster au sujet d’Esterhazy. « Ma

  1. Journal des Débats du 8 mars 1903.