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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


sons ; les Lettres d’un Innocent ont été plus persuasives que toutes les démonstrations par a + b sur l’obus Robin et le frein hydro-pneumatique.

On voudrait, au moins, un cri de colère, de bête blessée et encore saignante ; mais cette âme, incapable de ne pas se maîtriser, n’éclate pas.

Comme on lui a dit qu’il a paru, à Rennes, trop respectueux des chefs qui l’ont envoyé à l’île du Diable, tout ce qu’il peut trouver, c’est quelques épithètes usées ou des phrases comme celles-ci qu’il croit fortes : « Bertin-Mourot ajoute cette monstruosité… Si le général Mercier était loyal, s’il avait une conscience… Il serait bien difficile au général Roget de faire croire qu’il a une conscience. » Qu’un simple capitaine puisse parler ainsi d’un lieutenant-colonel et d’un général, cela lui paraît la plus grande audace.

La liste des témoins est épuisée. La déposition d’Esterhazy devant le consul de France à Londres est au dossier[1] ; il s’y avoue l’auteur (par ordre) du bordereau. Il ne reste plus à la Cour, avant de clore ses travaux, qu’à recevoir les deux rapports spéciaux qu’elle a demandés à l’État-Major général[2] et à l’Académie des Sciences.

Les généraux Balaman, ancien président du comité d’artillerie, Brun, commandant l’École supérieure de guerre, Séard, ancien directeur de l’École centrale de pyrotechnie, et Villien, inspecteur permanent des fabrications de l’artillerie, ont été désignés par André pour se prononcer sur les différentes questions techniques qui ont été soulevées à l’occasion de l’Affaire. Ils n’y ont été mêlés à aucun moment. Leur rapport est formel,

  1. Voir p. 77.
  2. Lettre de Baudouin, du 4 mai 1904, au ministre de la Guerre. (Revision, I, 143 et 547.)