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LA REVISION

Les députés ministériels, surtout les socialistes, crient d’abord que les documents sont apocryphes, que ce sont des faux ; sous la stupeur, l’honnêteté se révolte ; nul n’eût songé à prendre la défense de ces procédés de basse police, de plaider seulement les circonstances atténuantes. André, fatigué depuis longtemps, à l’été, il avait demandé à Combes de s’en aller[1], — malade ce jour-là, était affalé à son banc. Il ne connaissait pas les lettres de Mollin, mais sut bien, dès la première ligne que Villeneuve en lut, qu’elles étaient authentiques ; et il connaissait les fiches des francs-maçons, en avait fait abondamment usage, avec l’intime conscience d’une faute. Depuis que les journaux, avertis, avaient lancé l’accusation, Mollin, par ordre, avait emporté les fiches, afin qu’on pût affirmer qu’il n’y en avait pas au ministère de la Guerre[2].

Combes, les autres ministres, demandent des explications à André. Il répond qu’il entend, connaît pour la première fois ces lettres, qu’il s’informera, qu’il n’en sait pas plus.

Le malheureux est frappé d’un tel coup qu’il n’a point la force d’arrêter Villeneuve, de donner cette explication. C’est Combes qui la produit, dit tout de suite que « l’officier d’ordonnance du ministre a eu tort de faire appel à la personne dont il a été si souvent question » ; puis, avec sa vigueur, sa combativité ordinaire, il prend l’offensive, approuve André de s’être renseigné auprès des préfets, « rien n’étant plus logique ni plus légal », — ce qui avait été aussi l’avis de Waldeck-Rousseau[3]

  1. Chambre des députés, séance du 4 novembre 1904, discours d’André.
  2. Mollin, loc. cit., 219 et 220.
  3. « J’admettais très bien que les préfets, représentants du pouvoir central, fussent consultés pour les avancements importants. » (Note sur sa conversation avec Percin. — Voir p. 399).