naire patience ; Picquart en fit voir de la mauvaise humeur, s’en prenant un peu à tout le monde, et d’abord à ceux des anciens soldats de la revision « qui ne tenaient plus beaucoup à se battre, parce qu’ils s’étaient mis à ramasser le butin[1] ».
Pour Clemenceau, depuis qu’il était ministre, il avait cessé de penser que les Chambres réunies, si elles cassaient sans renvoi, « desserviraient l’intérêt public[2] » ; il n’aurait rien tant redouté, pour le gouvernement dont il faisait partie, qu’« une nouvelle édition » du procès de Rennes.
Il était monté alertement au pouvoir, revenant de loin, d’autant plus décidé à marquer sa trace, à agir, et il mena vivement la campagne électorale, « tenant la ligne droite entre ces deux aberrations », la révolution et la réaction[3], et, mieux encore, donnant la sensation du mouvement et de la vie. Contre les catholiques criant à la persécution, les faits parlèrent, les églises ouvertes, les offices toujours célébrés, les curés encore pensionnés. Une fois de plus, les partis d’opposition furent battus, les royalistes gardant à peu près leurs positions, mais les « progressistes » décimés et les nationalistes écrasés, pendant que les « revision-
- ↑ Gazette de Lausanne du 2 avril 1906. « La meilleure partie du butin », selon Picquart, serait revenue aux juifs ; ils se seraient poussés, surtout dans l’armée, « aux bons emplois… » « On a pu même constater, il n’y a pas longtemps, ce phénomène, dont la réalisation eût paru invraisemblable en 1898, en 1899 : celui de deux juifs, de deux coreligionnaires de Dreyfus, occupant l’emploi de chef de Cabinet, l’un à la Guerre (le général Valabrègue), l’autre à la Marine (l’ingénieur Dupont), c’est-à-dire dans les deux ministères auxquels est confiée la défense nationale ! » L’article fut reproduit avec empressement par la Libre Parole.
- ↑ Aurore du 31 janvier 1904. — Voir p. 285.
- ↑ Discours du 3 mai 1906 à Lyon.