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APPENDICE

L’absurdité du récit de De Mitry ne fut aperçue par Gonse que trop tard pour faire corriger sa version par cet officier. De Mitry, avisé, s’abstiendra, dans sa déposition ultérieure, de préciser le moment où D’Attel aurait recueilli les aveux.

Une note anonyme et sans date fut jointe alors au dossier des aveux. Il y était dit « que Lebrun-Renault n’avait pas adressé la parole à D’Attel, qu’il avait vu seulement circuler dans la pièce, entrer et sortir de la pièce où le prisonnier était gardé, un petit capitaine blond et mince dont le signalement répond bien à celui de D’Attel[1] ».

Anthoine, devant la Cour de cassation[2], n’assigne aucun moment précis au récit qui lui aurait été fait par D’Attel.

Lebrun-Renault, dans sa première déclaration à Gonse et à Henry, le 20 octobre 1897, n’avait rien dit de D’Attel[3]. Mais, devant la Cour de cassation, ayant été stylé, il dit que « D’Attel était présent lorsque la déclaration de Dreyfus fut faite ; il allait et venait[4] ».

À Rennes, le président demande à Anthoine : « Vous n’avez pas eu l’idée de demander au capitaine d’Attel comment il avait su ce qu’il vous rapportait ? — Aucunement », répond Anthoine[5]. Il ne dit même plus, comme il l’avait dit, le 22 janvier 1898, que c’était « à la sortie de la salle où Dreyfus était enfermé ».

En revanche, Lebrun-Renault affirme maintenant (observez le crescendo) que D’Attel a passé, dans la pièce où il se trouvait avec Dreyfus, cinq ou six minutes, mais sans parler ni au condamné ni à lui-même qu’il ne connaissait pas[6].

Dreyfus proteste aussitôt qu’il n’a pas vu cet officier

  1. Cass., II, 131.
  2. Cass., I, 282, Anthoine.
  3. Cass., II, 132.
  4. Cass., I, 275, Lebrun-Renault.
  5. Rennes, III, 85, Anthoine.
  6. Rennes, III, 82, 85, 86, Lebrun-Renault.