d’instinct. Les Félibres sont amoureux des choses du passé, ils cherchent à faire revivre les vieilles mœurs, les vieilles traditions, les vieilles coutumes: ils sont naturellement conservateurs, au sens le plus large de ce mot. Mais comme tout se traduit en France, et surtout dans le Midi, dans le langage de la politique, on a vu dans le Félibrige une tentative de réaction. On a considéré les Félibres, à tort ou à raison, comme les ennemis du progrès, du progrès scientifique, intellectuel et politique, et il y a là une nouvelle raison qui explique leur défaite sur le terrain social.
Faut-il, en fin de compte, applaudir à cette défaite ? Au point de vue pittoresque, il faut assurément la regretter, mais la disparition des vieilles mœurs, des coutumes locales, des costumes provinciaux, est un phénomène d’ordre général, et qui n’est particulier ni à la Provence ni à la France. Il faut en prendre notre parti. Au point de vue social, on reproche à l’enseignement de «déraciner les âmes», suivant l’expression de M. Maurice Barrés que j’ai déjà citée. Mais, comme le disait un critique parisien, si nous les déracinons de leurs préjugés locaux, et de leur «amour du clocher» pour les enraciner dans la raison, dans la science, et dans l’amour d’une patrie plus grande, de la véritable patrie, il n’y a pas lieu de s’en plaindre. Sans doute, il peut y avoir à cette opération des inconvénients plus ou moins durables, et je voudrais les examiner si j’en aVais le temps, exode des paysans vers les grandes villes, manie du fonctionnarisme, perte de préjugés qui ne sont remplacés par aucun autre sentiment etc… Mais il ne faut pas oublier que nous sommes encore arrêtés à une période de transition, et il ne faut pas confondre non plus certaines phénomènes économiques, provoqués par des causes plus complexes, avec les épisodes de la lutte engagée entre les dialectes provinciaux et la langue de la patrie française. La seule question que
