Page:Jouffret - De Hugo à Mistral, 1902.djvu/19

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Il y a une seconde raison qui est d’un autre ordre. Hugo a eu le bon esprit de vivre plus longtemps que Lamartine et que Musset. Il est mort en 1885, et il n’a cessé de produire jusqu’aux limites extrêmes de la vieillesse. Que dis-je ? même depuis sa mort, ce robuste travailleur nous donne de l’inédit. Une clause de son testament, qui témoigne bien de son souci constant d’occuper le plus longtemps possible l’actualité, exige qu’à certains intervalles, tous le trois ou quatre ans, ses exécuteurs testamentaires, Aug. Vacquerie (mort aujourd’hui) et Paul Meurice, publient un des manuscrits laissés dans ses tiroirs. Et notez bien que ces œuvres posthumes ne sont pas insignifiantes : le Théâtre en liberté. Toute la Lyre, La Fin de Satan, et Dieu, Dieu surtout, sont au nombre des plus belles productions du poète. Comme le Cid, dont il a chanté les exploits, sa dépouille mortelle, juchée sur un cheval de bataille, continue à remporter des victoires. Et ces publications posthumes ne sont pas épuisées. Nous attendons encore Océan, Le chevalier combat toujours.

Mes deux premières leçons seront donc consacrées à Victor Hugo. Ab Jove principaux. Dans celles qui suivront, j’étudierai ce qu’est devenue la poésie française dans les œuvres de ses successeurs, et principalement chez Leconte de Lisle, Sully -Prud’homme, Fr. Coppée et José Maria de Hérédia. Enfin j’ai cru répondre à l’un de vos désirs secrets en consacrant la dernière conférence de cette série à notre poésie provençale, et principalement à Frédéric Mistral. Vous n’avez pas souvent l’occasion sans doute d’étudier de près sur les textes originaux cette manifestation curieuse de l’esprit français. L’étude de la langue provençale exige des efforts sérieux, même de la part des Français du Nord, et à moins d’être un spécialiste des langues romanes, on n’a pas toujours le temps d’acquérir suffissamment la pratique de la langue d’oc, pour jouir pleinement du plaisir poétique qu’on trouve à la lecture des poètes de Provence.