Page:Jouffret - De Hugo à Mistral, 1902.djvu/98

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J’ai une seconde confidence à vous faire, un peu plus délicate et plus difficile à exprimer. Mais votre bienveillance m’encourage à tout dire. J’avais lu par hasard, dans un livre de science, une étude sur le diamant dont voici le passage essentiel. « Le diamant est le plus dur de tous les corps ; il les raye tous sans être rayé par aucun. Ce caractère, joint à sa densité (3,50) et à son éclat, suffit pour le distinguer de toutes les autres pierres. Par sa cristallisation, ce corps appartient au système cubique: la forme la plus fréquente est celle de l’octaèdre régulier surmonté sur chaque face d’un pointement à six faces… L’éclat de cette substance est fort remarquable et a reçu le nom d’éclat adamantin; elle produit sur la lumière la réflexion simple, mais le pouvoir réfringent et dispersif très considérable qu’elle possède produit les beaux effets de lumière que tout le monde connaît au diamant taillé… » (art. signé Lefébure). Un octaèdre régulier surmonté d’un pointement à six faces ! Mais cette définition pourrait s’appliquer également au sonnet. Comme le diamant, le sonnet a des formes géométriques, une fermeté sans égale, un éclat adamantin ; et faisant de plus réflexion que MM. Moissan et Frémy ont pu, grâce à des températures de 2900 ou 3000 degrés, transformer en diamants véritables de simples morceaux de charbon, j’écrivis, suivant les procédés de l’école parnassienne, le sonnet suivant que j’adressai à M. José-Maria de Hérédia, et que je prends la liberté de vous lire, parce qu’il contient en résumé toutes les théories et toutes les réflexions que je vous ai exposées.


Tes sonnets sont de purs diamants : forme exacte,
Fermeté sans égale, éclat adamantin.
Rien n’y manque; ainsi luit la rosée au matin.
La Nature y scintille et l’Âme s y réfracte.

Le drame humain, ayant le rêve pour entr’acte.
Tantôt frais et riant, tantôt sombre et hautain,