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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

II2 JOURNAL DE MARIE LENÉRU

me fait déplorer mon épreuve : je tâche de ne pas me plaindre, tout en priant énormément Dieu de me guérir mes oreilles bien vite, très vite.

Jeudi 27 juin.

Dans quelques jours, maman et moi partons pour la Breta- gne où nous allons prendre nos mesures pour notre change- ment de résidence ; il ne sera pas bien complet puisque nous reviendrons à Brest tous les étés ; mais tous nos hivers seront à Paris. J’en suis assez satisfaite, parce qu’il serait probable (on n’en sait rien encore) mais enfin il serait possible que les d’Auriac 1 viennent s’y établir, si mon oncle y trouve vacante la place qu’il désire. J’avais d’abord demandé à maman de rester ici, puis je me suis dit qu’il valait mieux que je l’accom- pagne pour prendre tous mes carnets, Paperasses, etc., et pour récolter des souvenirs (comme les Anglais ont un joli mot pour exprimer cela : recollect). J’ai besoin de revoir mon vieil océan, la seule mer qui ait eu l’honneur de me voir m’y baigner.

Il pleuvasse aujourd’hui : un bon jour pour visiter la Con- ciergerie ; j’aime énormément ce temps-là, il ne m’attriste pas du tout, au contraire ; tandis que le beau temps m’endort ; ce n’est pas étonnant quand on n’entend pas.

Tout à l’heure, j’ai interrompu mon journal ; une amie d’en- fance de maman qui est descendue ici, vient de lui faire une visite ; je n’ai eu le temps que de m’éclipser pour remplacer ma robe de chambre par une autre plus habillée, Je suis très con- tente de revoir Brest ; surtout la Grande Rivière et le phare du Porzic, ainsi que sa batterie souterraine ; mais j’y pense, nous ne pourrons pas la visiter faute d’officier de marine pour nous conduire. Quel malheur ! elle était si jolie ! il y avait des com- mencements de stalactites et puis, il fallait y descendre par un petit escalier tournant qui m’avait fait penser à un phare ren- versé. C’est le jour où nous y avons été que ma. jarretière

1. Il s’agit des Lionel Dauriac.