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  1. 10 JUURNAL DIE MARIE LENERU

Jeudi 26.

Mariage de Margot de M… hier, Mlle Chevert, la grande couturière, était venue m’’habiller, me poudrer — la première fois de ma vie — etc. On arrête M. B, dans la rue : Vous qui aimez tant Mlle Lenéru, vous devez être content, — Une amie nous tombe : Je n’ai pu résister au plaisir de venir vous le dire, Ils sont tous arrivés comme des fous : Oh ! Marie, Marie.

La vérité est que j’aime assez ces points de repère, ces occasions de me mesurer. Je ne m’abime donc pas trop ?

27 avril.

Et pourtant — j’ai peur que Dieu ne m’entende — j’ose presque dire que je ne regrette rien. Sans cataclysme, ou je serais carmélite ou, amusée’de succès provinciaux, avec mon accommodante gaieté, je n’en aurais pas demandé plus. J’au- rais « oublié que le Gange existe ». Je n’aurais pas cette fièvre en relisant les Déracinés de Barrès, cette émotion en reprenant pour la vingtième fois Marc-Aurèle, cet apaisement quotidien en faisant mon bréviaire de Leconte de Lisle. Je n’aurais pas ma préservative horreur de la femme, cet être dont la menta- lité, le cœur et le reste n’excèdent pas le journal de mode, avec, je le veux bien, ses dépendances, sa Causerie du Docteur et ses Avis aux jeunes mères, ses travaux d’aiguille et son Carnet mondain, ses Cœurs brisés ou sa Mer bleue. Car voilà toute la femme, non pas la femme frivole, mais la femme sérieuse et pas même comme elle est mais comme elle se rêvel

28 avril,

Leur incrédulité facile m’agace, j’ai envie de les convertir : à la première traverse, sans aller même jusqu’au premier cha- grin ce serait chose faite. O hommes de peu de doutel :,