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ANNÉE 1902

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La matière employée, il est vrai, n’est pas belle, et je pré- fère le beau pastel ressemblant. Je n’ai pas besoin d’avoir vu Mie Fel pour être assurée que son portrait lui ressemble,

Paris change, Paris devient une ville morte.

N’ayant ni la musique, ni l’amour, ni les sports, j’en arrive quelquefois à l’aiguille. Quand je suis noire d’imprimerie, je la savoure presque. Oh ! ce n’est pas qu’elle me fasse penser ! mais, au moins, je ne mets les pensées de personne à ma place.

Mne V… a le compliment d’une violence : Vous êtes mieux que personne.

Trez-Hir, 7 aoft 1902.

Je m’empare d’instinct, fût-ce pendant une heure d’impon- dérable coquetterie, de tout ce qui vaut, de tout ce qui dé- passe. D’un pays ou d’un homme, je prends ce qui me revient, ce qu’il y a de mieux. Mais je ne pourrais pas être jalouse, je ne le serais que de moi, de mon égale, de ma pareille.

Quand elles me parlent jalousie, je dis que je ne comprends pas, qu’il ne s’agit pas d’être sûre des autres, mais de soi. Qu’il faut être capable d’inspirer un sentiment tellement unique, qu’il ne puisse jamais se doubler. C’est en moi que je chercherais mes sujets d’inquiétude, sinon qu’importent des rivales inférieures ? Quel souvenir peuvent-elles laisser auprès du vôtre ? Je me soucierais peu d’être l’unique amour, mais le plus bel amour. Soyez irremplaçable et laissez-vous rem- placer.

Quand j’arrive ici, au bord de cette grande plage de sable, de cette grande plage de ciel et de cette grande plage d’eau, j’ai toujours un saisissement de. propreté, de netteté luxueuse comme la neige seule en donne aussi l’impression.