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2006 JOURNAL DE MARIE LENERU

pas le Dieu des bonnes gens et le catholicisme avant d’être une politique est un monachisme.

5 octobre.

« Quand l’injustice, en développant nos facultés, ne les a pas trop aigries, on se trouve plus à son aise avec les fortes pensées, avec les sentiments élevés, avec les embarras de la vie. Une espérance inquiète et vague exaltait mon esprit : je le tourmentais sans cesse, » :

Ainsi à l’origine des grandes carrières d’ambition, il y a toujours quelque chose, enfance ou jeunesse, à venger. « L’idée : de grandeur. et de prospérité, sans jalousie et sans rivalité, est une idée trop abstraite et dont la pensée ordinaire de l’homme n’a pas la mesure, »

Et de M. de Lafayette : « Dans son désir, dans ses moyens dese distinguer, il y avait quelque chose d’appris. »

J’aime tout de Talleyrand. Il faudra que j’écrive de lui. Parlant de sa mère dont tout le charme d’esprit avait été pour ses amis : « Elle ne voulait que plaire et perdre ce qu’elle. disait. » Rien dé mieux. Mais nous, nous n’avons plus assez avec qui perdre.

À Renée de M…, 8 octobre.

Pourquoi ne ferais-tu pas de la musique en diable ? Tu es assez intelligente pour la comprendre intellectuellement. C’est ce qui manque à la plupart des femmes, incapables d’aimer la musique comme une lecture, d’avoir des curiosités musicales et par conséquent de se faire intérieurement musiciennes. Tu pourrais, j’espère, voir dans une fugue de Bach autre chose qu’un monologue de salon, ou un exercice de mémoire à alter- ner avec la tapisserie.