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ANNÉE 1887

PR te

décision : c’est celle d’entrer en religion ; Andrée et Henriette sont mes deux confidentes. Combien j’ai hâte à l’été prochain, pour pouvoir confier mon secret à Fernande qui sait com- prendre ! Mais ce que jedésirerais bien vivement, c’est qu’après avoir passé mes années de jeunesse dans un ordre de mission- naires, une fois arrivée à un âge où je ne pourrai plus rendre au- tant de services, entrer en un cloître austère et me préparer à mourir en sainte. Si Dieu me trouvant assez bonne pouvait me décerner la palme du martyre, mes plus grands vœux seraient exaucés. Je crois devoir ces résolutions qui me semblent bon- nes au récit des persécutions des martyrs qu’on vient de nous faire au cours. Grâces leur en soient rendues que mon cœur n’écoutant que ma reconnaissance adresse à Dieu une prière qui augmente leur bonheur,

Ilme semble que j’ai fait d’énormes progrès — (on peut bien mettre cela dans son journal) — surtout au point de vue de la charité.

Pour la simplicité, je n’en ai pas fait autant que je l’aurais désiré. Malheureusement, je m’impatiente et je suis quelque- fois impolie avec maman.

Quoique j’aime beaucoup mon cours, je trouve qu’avec mes devoirs, je n’ai pas assez de temps pour penser, lire et m’étu- dier. Cependant, l’Évangile que nous y apprenons m’intéresse énormément. L’Écriture sainte contient des choses bien conso- lantes, mais elle en renferme aussi d’autres bien effrayantes, par exemple celle sur laquelle a roulé notre leçon de samedi.

« O Dieu, vous devant qui les Anges mêmes ne sont pas purs » et cette autre : « O Jésus qui n’avez pas horreur du cœur immaculé de Marie ». — Ce mot horreur, c’est bien à nous qu’il devrait se rapporter. Quand je pense que des créa- tures aussi peu dignes de considération comme nous ont trouvé le moyen de se révolter contre la volonté divine, tandis que des anges et des saints, êtres si sublimes, se sont courbés devant elle, je m’indigne contre moi-même. Si cette indigna- tion pouvait porter des fruits !

Le catéchisme d’aujourd’hui a roulé sur nos fins dernières