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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

LS

pas été pressées, car notre guide, loin d’être un Apollon, nous aurait pourtant volontiers montré jusqu’à la moindre pierre du château : mais du-haut de la tour du nord, nous avions aperçu notre embarcation, qui, gracieusement se balançait au pont Gueydon en nous attendant.

Alors, nous avons dit adieu à Mme P., et nous avons poussé, c’est-à-dire que nous nous sommes mises en marche, ou plu—. tôt notre embarcation s’est mise en marche pour l’Amiral Baudin.

Maintenant, comme j’ai la main fatiguée, je vais m’arrêter, et je reprendrai demain mon récit, car je veux tout l’écrire, parce que les deux jours que je viens de passer ont été bien agréables et me laisseront, j’en suis sûre, de bien bons souve- nirs.

Lundi 20 août.

Je reprends donc mon récit. Nous partimes en baleinière, lorsque le patron se mit à grogner en disant qu’il y avait des dames en désordre à l’avant. Fernande qui croyait que c’étaient des personnes — (ce sont de petits carrés de bois qui se mettent dans les trous où se glissent les avirons lorsqu’on ne rame pas) cherchait partout et demandait : « Où ça ? Où ça ? » Ensuite, nous avons voulu aller à la voile, maïs voilà que les matelots n’étaient pas très habiles et ils ont manqué nous jeter le mât sur la tête, En arrivant à l’Amiral Baudin, nous avons trouvé un officier de corvée qui nous a montré un canon de 11 mètres ; on l’a fait manœuvrer devant nous, mais comme une autre société composée de Mme Karadec, Mlle Michet, etc., etc., est arrivée, l’officier nous a laissées pour la recevoir,

Il n’y a que deux cuirassés comme l’Amiral Baudin. Lui, et le Formidable de Lorient. C’est un véritable engin de guerre, c’est écrasant tant c’ést grand, mais c’est bien laid. Je l’aurais peut-être trouvé superbe s’il n’avait pas été en essais et par conséquent si sale. C’était une véritable fourmilière, des masses d’hommes allaient et venaient, et tous travaillaient.