Page:Journal asiatique, série 1, tome 1.djvu/100

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envoyées dans cette capitale, la peste, ce fléau d’autant plus effrayant que les coups dont il frappe sont cachés, pénétra dans la ville, malgré toutes les précautions qui y avaient été prises pour s’en garantir. On ne s’aperçut de d’existence de ce fléau, que lorsqu’il était difficile d’y apporter remède. Ce fut une épreuve bien forte pour le cœur de M. le duc de Richelieur entouré de morts et de mourans, ce cœur si bon et si sensible était déchiré à chaque instant du jour. Odessa, dans ce tems de calamités, paraissait anéantie ; ce n’était plus qu’un vaste tombeau : un silence morne régnait sur les places et dans les rues désertes de cette ville, naguère si animée et si bruyante. Toute espèce d’affaires fut suspendue ; chacun ne songeait qu’à se garantir du fléau qui le menaçait : M. le duc de Richelieu bravait seul les dangers dont il était environné ; il exposait continuellement sa propre existence pour sauver de malheureuses victimes, et surtout pour préserver du mal ceux qui n’en étaient pas encore atteints, et empêcher la maladie de s’étendre dans le pays. On le voyait tous les jours visiter les malades de la ville, et entrer même dans les hôpitaux des pestiférés, pour encourager les médecins qui n’osaient plus en approcher. Les mesures qu’il avait adoptées, et qu’il faisait exécuter strictement, arrêtèrent enfin la maladie après quatre mois de ravages, pendant lesquels le dixième de la population d’Odessa fut enlevé. La ville en fut délivrée ; mais les précautions qui durèrent encore pendant plus d’un an, parce que la peste continuait à exercer ses fureurs dans plusieurs