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Page:Journal asiatique, série 1, tome 3.djvu/140

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Tandis que les ennemis de Lieou-thsing, réduits au silence par les dernières mesures de l’autorité publique, préparaient dans l’ombre une nouvelle attaque contre la réputation de ce jeune homme, celui-ci n’était occupé que de Hoa-thian son défenseur.

« Il ne m’a pas même entrevu », disait-il à sa mère ; « et pour s’être arrêté une fois dans notre jardin, il m’a écrit des vers tout pleins d’amitié, des vers qui partent du cœur. Il s’est chargé de mon infortune, et s’est exposé pour moi au ressentiment de mes ennemis. Enfin, au moment de son départ, il a obtenu par sa recommandation un édit qui me place sous la protection des autorités. Fût-il mon père ou mon frère, il n’aurait pas pu faire davantage ; c’est un ami tout divin. Mais après tant de faveurs reçues, je ne lui ai point encore donné le moindre signe de ma reconnaissance ; comment pourrais-je goûter le repos ? Heureusement il n’y a pas très-loin d’ici à Canton. J’ai dessein d’y aller pour lui faire mes remercîmens en personne, et lui montrer que je ne suis pas un ingrat. »

— « Il serait bon sans doute », répondit Madame Yang[1], « de lui faire vos remercîmens en personne ; mais vous êtes tout jeune, et n’avez jamais

  1. En prenant le titre de Fou-jin, Madame, les femmes mariées conservent en Chine leur nom de famille. Ainsi Madame Yang était Mlle Yang avant son mariage. Cet usage n’est cependant point constant ; et quelquefois les femmes prennent le nom de famille de leur mari.