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Page:Journal asiatique, série 11, tome 5.djvu/571

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SOCIÉTÉ ASIATIQUE.

point un dérivé direct de l’écriture phénicienne ; elle dérive plutôt de l’écriture araméenne, restée seule en usage depuis J.-C. ;

2o Qu’antérieurement à la captivité, la seule écriture en usage était l’hébreu archaïque, caractère très voisin du phénicien :

3o Que, pendant une certaine période, l’écriture araméenne s’employait simultanément avec l’hébreu archaïque, auquel elle s’est peu à peu substituée :


« Les limites de cette période intermédiaire, dit le savant académicien, ne sauraient être déterminées avec exactitude, à l’aide des seuls monuments, car ceux-ci nous font complètement défaut, mais les traditions et les textes viennent ici à notre secours. Le nom d’aschourith (assyrien) donné par l’école rabbinique à l’alphabet carré ; le rôle qu’elle assigne dans l’introduction de cet alphabet à Esdras, personnage collectif qui résume l’ensemble des traditions relatives au retour des Juifs, semble prouver que l’introduction de l’écriture araméenne coïncide avec le grand mouvement araméen qui envahit toute la Syrie et toute la Palestine aux vie et ve siècles avant notre ère. L’écriture hébraïque s’aramaïsa en même temps que la langue hébraïque[1], — c’est un fait naturel qui tient à des causes générales, — et dès lors elle suivit, excepté sur les monnaies, les destinées de la paléographie araméenne[2]. »


Ces conclusions ont été pleinement confirmées par les inscriptions hébraïques mises à jour depuis l’époque de cette publication. Les belles découvertes de M. Clermont-Ganneau, la stèle de Mésa et l’inscription de Siloë, nous offrent des spécimens particulièrement intéressants de l’hébreu archaïque. Malheureusement une grande lacune nous dérobe pendant plusieurs siècles l’écriture hébraïque, et quand nous la retrou-

  1. Les transformations de l’hébreu sous l’influence de l’araméen sont faciles à suivre dans la littérature juive. Au temps d’Ézéchias (viie siècle avant J.-C.), l’araméen n’était compris que par les gens de la Cour. Les officiers du roi de Juda dirent au général assyrien Rabsçaké : Parle araméen à tes serviteurs, car nous l’entendons, et ne nous parle point en langue judaïque, pendant que le peuple qui est sur la muraille nous écoute (Isaïe, xxx, 11). Au retour de la captivité, l’hébreu et l’araméen étaient en usage simultanément, et plusieurs chapitres du livre d’Esdras sont rédigés en araméen. Au premier siècle avant J.-C., commença la rédaction de la Mischnah dans un hébreu technique, fortement influencé par l’araméen. Plus tard fut rédigé le Talmud (le Babli et le Jérusalémite) en araméen seulement.
  2. M. de Vogüé, loc. cit., p. 338.