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Page:Journal asiatique, série 6, tome 5-6.djvu/1083

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DU BUDDHISME DANS LE KASHMIR.

que le pays de Kashmir était primitivement un lac ou une demeure de Nâgas, et que le premier soin de Madhyântika fut de les chasser et d’en nettoyer le pays[1].

Tel étant l’état du Kashmir avant le buddhisme, l’œuvre des disciples de Çâkyamuni aurait été d’abord de dessécher les marais, de régler le cours des eaux, de rendre le pays habitable, puis d’y attirer les gens du dehors pour le peupler. Une telle œuvre, si elle n’est pas historiquement vraie, est au moins très-vraisemblable. Les moines chrétiens n’en ont pas accompli d’autre du ve au xe siècle en Gaule, en Germanie et ailleurs[2]. Le Kandjur et Hiouen-Thsang disent positivement que « Madhyântika fit venir des contrées voisines d’abord des religieux, puis des habitants, dans un pays primitivement désert, qu’il y bâtit des villes et des villages, et y introduisit la culture du safran. » Hiouen-Thsang ajoute que « à la mort de Madhyântika, les Kashmiriens se donnèrent un roi ; » et il fait ainsi remonter jusqu’à

  1. Wassilief, I, 39, note.
  2. Je ne crois pourtant pas que les moines buddhistes aient jamais rendu des services de la nature de ceux par lesquels les Bénédictins se sont honorés dans l’époque barbare. Les religieux buddhistes ont exercé une immense influence morale ; ils ont adouci le caractère des peuples les plus féroces du monde ; mais ils n’ont pas donné l’exemple du travail, du développement des facultés et des énergies natives. Une telle tendance n’est pas dans la direction du buddhisme. Le rôle attribué à Madhyântika présente une exception remarquable et inattendue, à laquelle non-seulement les traits fabuleux du récit, mais même les prétentions évidemment exagérées des buddhistes ne doivent pas nous empêcher d’avoir égard.