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SEPTEMBRE-OCTOBRE 1902.

propre à aggraver nos souffrances qu’à les soulager. Seul le Bouddha répond avec prudence et sagacité ; notons que le maître du Saṁgha partage peut-être les vues d’Ajita et de Sañjaya, mais qu’importe ? médecin habile, il a conçu un plan merveilleusement propre à réaliser le bonheur actuel. La maladie, la vieillesse et la mort sont rendues supportables ; les moines, fussent-ils de basse caste, fussent-ils esclaves, ne revêtent-ils pas la liberté et la dignité en même temps que le vêtement rouge[1] ? ne jouissent-ils pas, loin des entraves de la maison, de la famille et de la richesse, « d’une vie libre comme l’air » ? ne possèdent-ils pas un heureux contrôle sur les sens, vêtus autant qu’il est nécessaire, ne mangeant pas au delà de la mesure ? n’arrivent-ils pas à jouir du bonheur du samādhi et du nirvāṇa ? La mort, le repos définitif, est une délivrance pour les philosophes du dégoût ; tous les hommes craignent le châtiment et la mort : l’arhat ne redoute aucun châtiment ni dans cette vie, ni dans la vie à venir, s’il en est une[2].

On trouvera dans les livres de M. Rhys Davids — notamment dans les belles notices qu’il a consacrées aux sûtras du Dīghanikāya — un exposé heureusement nuancé de cette ingénieuse théorie. Rien ne touche Bouddha que ce qui est visible, actuel ; il défend la recherche scientifique et proscrit, par le souci d’une hygiène bien comprise, l’inquiétude de

  1. Minayeff, p. 173.
  2. Hopkins, Great Epic, 145 (sur le nirveda). — Sur la crainte de la mort et du châtiment, Milinda, 146.