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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

l’évêque d’Autun qu’il devrait remplir le vide laissé par Mirabeau, et, à cet effet, prononcer son oraison funèbre ; il y ferait un résumé de sa vie en s’appesantissant sur les dernières semaines, où il s’efforça de rétablir l’ordre, puis appuyerait sur la nécessité de l’ordre et ferait intervenir adroitement le roi. Il répond qu’aujourd’hui toutes ses pensées ont roulé là-dessus. Je lui dis qu’il n’y a pas un moment à perdre, car de semblables occasions se présentent rarement. J’ai parlé aujourd’hui au comte de Montmorin d’un successeur à Mirabeau, mais il objecte qu’il ne voit pas facilement qui on pourrait mettre à sa place. Il avoue que Mirabeau était décidé à ruiner La Fayette, et prétend qu’il l’en avait empêché quelque temps. Il ajoute que La Fayette est un roseau bon à rien. Il croit que tout ce qui reste à faire maintenant est de convoquer la prochaine Assemblée le plus tôt possible, d’en exclure les membres de l’Assemblée actuelle, et de la réunir loin de Paris. Les théâtres font relâche aujourd’hui. La journée est belle.


3 avril. — Journée extraordinairement belle. Je vais à Marly. Mme du Bourg m’accueille avec la joie de quelqu’un qui désire quelque chose de la ville pour changer la monotonie de la campagne. Après le dîner, nous nous promenons longtemps dans le jardin, et nous voyons de nombreuses scènes d’amour rustique. Les bergers et les bergères semblent s’inquiéter médiocrement de la présence d’étrangers, et continuent leurs gambades aussi librement que leurs troupeaux. Ceci nous fournit un sujet de conversation. Je retourne en ville et passe la soirée avec la duchesse d’Orléans. Mme de l’Étang est présente. Elle est, comme beaucoup d’autres, violemment aristocratique, et cela nous amuse. Elle est belle.


4 avril. — Je suis aujourd’hui les boulevards aussi loin que le permet le convoi de Mirabeau ; puis je retourne au