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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

val est dénoncé par l’Assemblée nationale (le roi reconnaît ce nom dans son discours), et que le ministère actuel sera mis en accusation. J’exprime mon opinion qu’après ce qui vient de se passer, on ne devrait pas permettre au comte d’Artois de rester en France. On en convient. On dit qu’on va faire le procès du maréchal de Broglie, et probablement celui du baron de Breteuil. Je soupe au club, et comme le bordeaux est le meilleur que j’aie encore bu en France, je bois à la liberté du peuple français et de la ville de Paris. On fait honneur à mes toasts et je reviens chez moi. La journée a été très belle. On dit que le roi sera à Paris demain à onze heures. Pour quoi faire ? — Bon mot : Le baron de Besenval est dénoncé à cause de certaines lettres qu’il avait écrites et qui ont été interceptées. Le duc de La Rochefoucauld, député de la ville de Paris à l’Assemblée nationale, rencontre le baron sortant du cabinet du roi. « Eh bien, monsieur le baron, avez-vous encore des ordres à donner pour Paris ? » Le baron prend cela pour une politesse. « Non, monsieur le duc, excepté qu’on m’envoie ma voiture. — Apparemment, c’est une voiture de poste, monsieur le baron. » — Un autre : Hier à la procession, le roi et le comte d’Artois qui marchaient ensemble, étaient serrés par la foule. Un député dit à un autre : « Voyez comme on presse le roi et M. le comte d’Artois. » L’autre répondit : « Il y a cette différence pourtant, que le roi est pressé par l’amour de son peuple. » Le roi, n’entendant que les derniers mots, se retourne pour répliquer : « Oui, c’est juste. »


17 juillet. — Ce matin, mon cocher me dit qu’il y a des affiches défendant aux voitures de sortir, le roi devant arriver entre dix et onze heures. Aujourd’hui encore on ne pourra traiter aucune affaire. Je m’habille aussitôt et je sors. Grâce à l’aide de Mme de Flahaut, j’ai une fenêtre dans la rue Saint-Honoré, par laquelle le cortège doit passer.