Page:Journal des économistes, 1849, T23.djvu/229

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DE LA LEGISLATION DES VOIES DE TRANSPORT. 221 de 1811 n’équivalent qu’aux deux tiers du nombre de voyageurs qui serait représenté aujourd’liui par cette somme. En faisant cette rectification, on trouve la proportion suivante : En 1811 1 voyageur. En 1833 5,4 — En 1842 9,5 — Ces chilfres, sur lesquels nous aurons occasion de revenir, nous paraissent démontrer la rapidité du développement de ce besoin général de locomotion, autrefois presque inconnu. Qu’y a-t-il d’étonnant à ce que l’ancienne législation, les idées du public, se soient trouvées tout à coup déconcertées par une progression aussi anormale ? C’est avec des lois de la République et de l’Empire, et souvent même avec des édits de l’ancienne monarchie qu’on veut régir, réglementer une chose qui alors existait à peine ; de là, des contradictions, des tiraillements, des injustices sans nombre, dont nous serions vivement frappés si elles n’avaient grandi avec nous, et si nos yeux n’étaient pas habitués à les voir. Mais, supposons un étranger parcourant la France et visitant ses diverses voies de communication. À peine débarqué, il trouve un chemin de fer pour le conduire à Paris. Quelques heures ont suffi pour ce voyage. On ne lui a demandé, pour un si grand service, qu’environ 10 centimes par kilomètre ; on ne lui en eut demandé que 6 s’il eût consenti à braver le soleil et la pluie dans les tombereaux dits wagons de troisième classe. Le voilà grand partisan des chemins de fer. Mais il y avait peu de monde dans le convoi et il n’a pas rencontré beaucoup de convois dans son voyage. Il ne comprend pas comment la Compagnie peut rentrer dans ses frais de transport et dans l’intérêt des capitaux immenses employés à la construction d’une voie aussi dispendieuse et d’un matériel aussi considérable. On lui explique alors ou que l’État a fait la voie et l’a donnée à la Compagnie, ou qu’il lui a donné quelques dizaines de millions et prêté quelques autres, ce qui revient au même pour certaines Compagnies qui ne payent pas plus d’intérêt qu’elles ne pensent à rembourser le capital. En somme, il en résulte que lui, voyageur, a eu sa part dans la subvention ; que son voyage, qu’il a payé 20 fr., en a réellement coûté 40. C’est-à-dire que, sans la subvention de l’État, la Compagnie eut été obligée de lui demander 20 fr. de plus. C’est donc lui, en définitive, sauf un léger bénéfice prélevé par elle, qui a reçu cette subvention. Etonné, mais enchanté d’une pareille générosité, il en demande le motif. On lui explique alors tous les avantages indirects qui résultent pour l’État de la locomotion des personnes : c’est la production, c’est la consommation qui s’accroissent ; ce sont les propriétés qui augmentent de valeur, ce sont toutes les branches du fisc qui rendent davantage, etc., etc. Que, d’ailleurs, rien n’est si libéral, si démocratique que l’abaissement des tarifs qui permet à tout