Page:Journal des économistes, 1876, SER3, T42, A11.djvu/432

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du botaniste Seringe, il passait sa thèse de docteur ès-sciences en 1835. Dans cette thèse, il proposait un système de formules botaniques analogues aux formules démographiques qu’il devait imaginer plus tard, et qui ont été universellement adoptées. En outre, il jetait les premiers fondements de l’anatomie végétale, que personne n’avait encore songé à étudier. Un incendie détruisit la plupart des exemplaires de sa thèse, qui s’est ainsi trouvée presque-perdue pour la science.

En 1840, M. Achille Guillard céda son institution à son frère, et partit pour l’Italie où l’appelait la ville de Milan. Il organisa et dirigea la compagnie du gaz de cette vaste cité, il en construisit avec rapidité et économie les appareils et les usines, et ne quitta l’Italie définitivement qu’en 1844. Rentré en France, il fut chargé de la liquidation d’une grande compagnie française d’éclairage au gaz, et montra, dans cette opération difficile, la sagesse d’un habile administrateur.

Enfin, rendu à ses occupations favorites, il put se livrer tout entier aux sciences naturelles. Il compléta ses élégants travaux sur l’inflorescence, c’est-à-dire sur l’ordre de développement des rameaux et des fleurs dans les plantes. Il montra que cet ordre de développement est toujours le même pour chaque espèce, souvent pour chaque genre, souvent pour chaque famille. Enfin, il détermina les lois auxquelles il est soumis. Cette étude gracieuse est d’un grand intérêt, car elle permet de déterminer le port des végétaux. Ce caractère est d’une importance évidente ; c’est lui qui donne aux plantes leur poésie, car c’est lui qui nous fait reconnaître chaque plante au premier coup d’œil ; et pourtant, personne n’avait pu le définir avant M. Guillard. Dès 1833, il avait publié les fondements de cette partie de la science ; il en avait poursuivi l’étude en Italie, au milieu de préoccupations incessantes ; il l’acheva définitivement à Paris.

Plus tard, M. Guillard a publié des travaux d’anatomie végétale trop techniques pour que nous y insistions ici. Enfin, il entreprit une série d’observations sur ce qu’on a poétiquement appelé l’horloge de Flore, c’est-à-dire l’heure d’épanouissement des fleurs. Cet important travail était déjà assez avancé quand la mort est venue l’interrompre.

Républicain convaincu, M. Achille Guillard n’avait vu le coup d’État qu’avec une amère douleur. C’est alors que, épouvanté de la dégradation apparente dont la France semblait subitement frappée, il se demanda si les sociétés humaines étaient soumises, comme les autres organismes, à des lois naturelles et générales dont un accident peut bien altérer momentanément les effets, mais dont le