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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/188

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VISIONS DE L’INDE

et physique que soutiennent la fraîcheur de ces murs, l’odeur survivante de l’encens, l’effusion des hymnes comme restée dans cet air léger, l’arôme enfin d’âmes chrétiennes qui pleurèrent leur patrie et espérèrent dans l’au-delà.

Cette aspersion de chaste tendresse me lave des impressions de meurtre, de luxure, d’orgueil dont je suis encore sali après mes visites en ces terribles temples de l’Inde païenne. J’ai oublié que là-bas, près du lac perfidement tranquille, se dressent des pagotins de folie et de sang ; et j’ai oublié ma solitude d’âme, mon inquiétude, mes demi-terreurs, le malaise de me sentir sans cesse étranger et menacé. Ah ! il me fallait, pour mieux comprendre l’idéal supérieur que représente « Marie », ce voyage lointain, cet arrachement de la terre où je suis né, ce contact avec des peuples raffinés et barbares, l’apparition des anciens dieux. Je constate l’ascension dont le christianisme a doté l’âme humaine ; il l’a émancipée de cette nature splendide et maléfique où la lient et la noient les plus hautes philosophies païennes ; les instincts mauvais et bons, également glorifiés, s’entrelacent dans l’âme qui n’a pas connu le Christ, comme les jungles que je viens de traverser sont pleines de serpents, de miasmes, de fauves et aussi de fleurs inconnues, de fruits délicieux, de végétations magnifiques et