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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/216

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VISIONS DE L’INDE

nous poursuivent jusque sur les tombes. Des tombes, il y en a partout, dans chaque chambre, la plupart vides, — et pour l’ornement. Car, là, seuls, sont enterrés l’aventurier persan, sa femme et son serviteur fidèle, dont il ne voulut se séparer jamais — même après sa mort. Ce prévaricateur qui connaissait trop le cœur humain ne mangeait aucun mets et ne buvait aucune boisson sans les faire goûter d’abord par précaution à son domestique.

Rien de plus aimable, de plus gai aussi que ces sépultures de l’Asie musulmane. À Constantinople déjà, l’humble pierre colorée et incrustée de fleurs, dans les innombrables cimetières, n’avait pu me donner l’impression du deuil. Ici, c’est mieux encore. On ne sent que la richesse et le plaisir. Dieu sait pourtant quels prodiges les artistes ont dû accomplir pour animer ces murs morts vraiment, puisque le visage de l’homme, la silhouette des animaux en sont chassés par le commandement du prophète !

Les fleurs et les vases qui les portent se multiplient dans les panneaux de marbre ; ces vases et ces fleurs, par la magie de l’art, ressemblent quand même à des êtres vivants. Ils sont fantastiques. Une imagination exquise et variée en fait des monstres charmants. Ces vases sont animés ; ils se gonflent en ventres heureux, parfois se dédoublent