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VISIONS DE L’INDE

sang, de fleurs, de cantiques, de baignades et d’horreurs…

Déjà nous sentons que nous arrivons au quartier sacré. Les cases obscures, où grelottent de malaria des troupeaux humains, s’ornent de statues grotesques, en bois, en pierre, en terre, surtout en pauvre terre friable du Bengale. Des affiches, coloriées avec l’effronterie des images d’Épinal, représentent la Déesse, un pied sur le sexe, un autre sur le cœur de son Époux, et brandissant de ses bras innombrables les richesses et les armes. Ah ! pauvres huttes en paillassons avec des bambous, des tuiles étroites et noires, des lambeaux qui pendent, de mauvais mallons dont le rouge ressort, comme vous étiez belles cependant sous le soleil d’Asie et flambantes des images grossières de Kali !

Nous descendons devant une étroite voie qui sert d’accès au temple de la Déesse. Est-ce la tombée de l’après-midi avec la fièvre qui commence pour moi à cette heure, mais je me sens tout bouleversé par le spectacle qui m’est offert. Justement voici les consuls qui nous ont devancés avec des femmes et des jeunes filles charmantes, avides d’émotion. Elles en seront tout à l’heure rassasiées. Ils sont assaillis par des prêtres qui tiennent à leur servir de guides. Mais notre boy en a écarté la plupart, voulant sans doute rafler la