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Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/256

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VISIOINS DE L’INDE

prêtres. Il tousse affreusement et, dans son atmosphère, traîne des parfums rances et l’haleine horrible des phtisiques. C’est un homme-ruine qui me promène au milieu d’autres ruines.

Si jamais ville eut une destinée brillante et courte, ce fut Fattepur Kipri. Akbar veut une résidence de plaisir : il bâtit sur une colline entre deux villages, une cité splendide ; puis, il s’aperçoit que l’eau n’est pas bonne, et, avec un caprice d’empereur ou de grande courtisane, il rejette ces palais comme on casserait un éventail. D’ailleurs, tout est étrange en cette histoire sur laquelle plane une mystification. Derrière ce décor d’architectures, de gateways, de corniches, de dômes, de temples, de subtiles sculptures, l’âme prodigieuse et dérisoire d’un fakir transparaît comme la main d’un montreur de marionnettes.

Il était plus ou moins persan, s’appelait Sulim Chesti ; et son mahométisme était teinté de magie. Il habitait dans une caverne et menait cette vie d’ascète qui a encore aujourd’hui sur le peuple hindou un si irrésistible ascendant. Revenant de sa campagne contre les Uzbeks révoltés, l’empereur planta sa tente sur le roc entre Fattepur et Kipri. Sa femme, une princesse hindoue de la famille Amber, l’accompagnait. Que se passa-t-il entre le couple royal et l’ermite ? Toujours est-il qu’Akbar