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VISIONS DE L’INDE

Dévaki s’efforce d’attacher au mortier, pour le punir, le tout petit enfant ; mais elle a beau accumuler les liens, les ajouter les uns aux autres, elle ne peut jamais faire le tour de ce bébé. Un espace de deux doigts manque toujours. Alors Chrisna prend pitié de sa mère et de cette fatigue vaine. Avec grâce, il s’attache lui-même, voulant prouver que le bienheureux fils de la bergère n’est accessible à personne ici-bas, pas même au plus subtil, pas même au plus persévérant, mais qu’il se donne et se lie volontiers à ceux dont le cœur est tout à lui !


Au milieu de la cour, l’arbre féminin et sacré, le pipala, au feuillage de dentelle, est entouré d’un cordonde femmes brahmines qui versent pieusement l’eau de la Jumna recueillie en leurs vases de cuivre, espérant que le bois reconnaissant leur rendra en fécondité cette religieuse offrande. Hélas, la vénalité et la simonie ne manquent jamais aux églises hindouistes. Dans un angle de la cour, la bayadère me montre sans ironie, — car elle trouve aussi naturel de payer les faveurs du dieu Chrisma que d’acheter les siennes, — un arbre mort et artificiel, celui-là, un extraordinaire meuble affectant la forme luisante d’un grand végétal écorcé et sans feuilles, dont les racines sont sculptées selon l’apparence redoutable des cobras. Cet arbre de science et de méditation n’est