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VISIONS DE L’INDE

je ne suis plus autant à craindre. J’ai perdu mes illusions sur l’Inde, je ne suis plus dupe des prestiges de ce beau pays, même philosophiques. Je suis impatient et las, j’ai trop bu, près des étangs empestés des pagodes, le souffle empoisonné, fébrifère du dieu Shiva, je me suis assis sur trop de tombes… Mon âme elle-même s’est désenchantée dans l’atmosphère de ces âmes chancelantes.

Lorsque j’ai causé avec les plus érudits d’entre les Hindous, chez qui l’obscénité et la vénalité populaire ont disparu ou se sont amorties, c’est l’orgueil qui se trahit sous des apparences de sérénité ou de bon accueil ; l’orgueil éperdu et hypocrite. Je m’explique dès lors cette parole sévère d’un moine catholique qui longtemps avait vécu dans ces redoutables et exquises contrées : « Le double serpent règne ici, le serpent de la morsure et celui de la ruse, le symbolique dragon qui tenta nos premiers pères par le faux espoir de la connaissance et par l’ivresse mensongère qui fait croire qu’on va devenir un dieu. »

II

L’orage de sable.

Les journées sont troubles. Je suis fatigué de