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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

— Me séparer de vous !… de vous !… Mais vous n’y pensez pas, mon enfant.

— Il le faut…

— Mon Dieu, mon Dieu, que de malheurs !

Elle roula son chapelet et commença : « Je vous salue, Marie, pleine de grâces… »

— Tu prieras plus tard…

En se retournant, elle vit s’agiter le rideau, dans la maison voisine.

— Il est toujours là…

Elle souleva le tableau.

La pochette glissa, s’échappa, s’abattit sur le plancher. Une balle en avait écorné un coin… C’était tout… Elle était intacte…

Morte de peur, Pulchérie n’osait s’en emparer…

Cela lui paraissait quelque chose d’infiniment redoutable, et l’était en effet, ce mince sachet ensanglanté par trois fois…

— Fais vite, ma bonne, je commence à me fatiguer d’avoir les bras en l’air, et, de l’autre côté de la rue, l’espion n’ose pas quitter son poste…

Pulchérie obéit… Ses mains tremblaient comme des feuilles par un coup de vent…

— Tu trouveras mon sac sur le lit de Rolande… tu prendras l’argent que tu veux… Vite, ma pauvre bonne, vite… Il me semble que, là-bas, l’homme se doute… Vite !  !

Les jambes chancelantes, Pulchérie se retenait au mur…

— Sur ta vie, et si tu crois en Dieu, ne te sépare jamais de ces papiers et n’en parle à personne… Jure, ma bonne, jure, sur la croix de ton chapelet…

— Je jure ! fit la pauvre femme d’une voix éteinte.

— Sur moi, ces papiers seraient perdus… Toi, on ne soupçonnera jamais que tu les emportes !…

— Mais toute seule, sainte Vierge, toute seule, qu’est-ce que je vais devenir ?…