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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

dire à Jean-Louis dans cette lettre tout ce qu’il eût fallu pour lui faire comprendre la gravité du lourd devoir qu’on lui imposait.

Donc, mieux valait, pour le moment, ne point s’en séparer.

Il profiterait de la première occasion, avant d’entrer en Allemagne, pour remettre le papier en mains sûres.

Les premiers jours après le départ, du reste, il n’eut guère le temps d’y réfléchir. Le branlebas de combat le prenait tout entier et ne lui laissait pas d’autres préoccupations que celles de recevoir des ordres et de les faire exécuter.

Le régiment s’embarquait pour la Lorraine, direction de Nancy.

À la gare de Sedan, les trains attendaient, un par escadron, quatre ou cinq fourgons pour chaque peloton. Il n’y avait pas deux heures que l’ordre de mobilisation était arrivé, lorsque les trains s’ébranlèrent… Tant de fois les dragons avaient exécuté cet exercice, au complet de guerre, qu’il n’y eut pas un accroc. L’embarquement se fit, sans cris, sans heurts, avec la précision d’une machine supérieurement réglée…

Puis, ce fut la descente en Lorraine, les premières chevauchées à la recherche de l’ennemi, les premières rencontres, les premiers contacts avec les partis allemands, les premières fièvres du baptême du feu, les premiers coups de lances, les nuits de bivouac sous la pluie, dans la boue, ou sur la paille de quelque grange, côte à côte avec les hommes, les premiers blessés et les premiers morts, la guerre enfin, avec ses impitoyables horreurs et la simplicité de ses sacrifices…

Puis, soudain, un ordre… Le 12 août, à deux heures du matin, le régiment est enlevé du front de Lorraine…

Où l’envoie-t-on ?