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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/415

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rations d’un autre ordre : quelle sécurité, dirais-je, peut-on trouver dans l’exercice de l’intolérance ? On est sûr de sa foi, je le veux ; mais est-on sûr, au même titre, de l’interprétation qu’on lui donne ? Le symbole le plus immuable a-t-il traversé les siècles sans subir de transformations ? Les théologiens les plus profonds sont-ils toujours d’accord entre eux ? Ne peut-il pas arriver qu’une autorité proscrive aujourd’hui la doctrine qu’elle imposera demain ? Je pourrais citer des exemples terribles ; je me borne à celui-ci, qui est illustre. Vous connaissez la condamnation de Galilée. Vous savez qu’on l’a tenu en prison six mois, qu’on l’a fait comparaître en criminel devant la chambre ecclésiastique, et qu’enfin, après une longue procédure, on l’a condamné à faire amende honorable, un cierge à la main, pour avoir découvert le mouvement de la terre. Cependant quel est aujourd’hui le théologien, quel est l’inquisiteur qui regarde la terre comme immobile au centre du monde ? Et quel est l’ennemi de la religion qui fasse du mouvement de la terre un argument contre l’authenticité de la Bible ? Voilà donc un jugement deux fois regrettable, puisqu’il était inutile et puisqu’il reposait sur une erreur grossière. Demandez-vous s’il ne doit pas servir de leçon à la postérité ; et, quand vous êtes tentés d’appeler la force au secours de votre opinion, prenez garde de ressembler aux juges de Galilée, qui ont condamné la science dans sa personne et laissé un monument éternel de leur ignorance. Cependant l’intolérance est si sûre d’elle-même qu’elle ne se renferme pas dans les choses de la foi, et qu’à chaque instant elle empiète sur le domaine des sciences et des lettres. Nous venons de la voir dans le procès de Galilée, luttant contre l’astronomie ; plus tard, elle a combattu de toutes ses forces la découverte de la circulation du sang. Il y a bien peu de découvertes utiles à l’humanité contre lesquelles elle n’ait dressé des obstacles ; elle semble dire à la pensée humaine ; « Arrête--