Page:Julien empereur - Oeuvres completes (trad. Talbot), 1863.djvu/18

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copiste, n’offre guère de différence avec lui que le mérite d’un style plus poli que celui de son modèle. Quant à Théodoret, on ne peut que louer son érudition et la hauteur du point de vue où il s’est placé pour écrire son histoire. Mais on doit aussi cet hommage à la vérité, que, de même que Socrate et Sozomène, il est loin d’avoir toujours le sens critique, qui discerne dans l’histoire ce qui n’est qu’à moitié vrai de ce qui l’est absolument, la légende de la tradition avérée, les effets de l’illusion de la vue même des choses, le conte et la merveille du fait positif et de la réalité. Il faut avouer que le scepticisme le plus timide ne saurait accepter sans contrôle tous les faits qu’ils relatent, et que, sans accuser leur bonne foi, on peut se méfier de leur crédulité. C’est avec une semblable réserve qu’il faut croire au témoignage de saint Grégoire de Nazianze, dont le zèle pieux et l’ardeur polémique se laissent entraîner jusqu’à la colère et à l’oubli de la mesure. On doit craindre qu’un auteur qui donne à son livre le titre d’Invectives, n’apporte dans son jugement une irritation d’humeur et une âpreté de style, qui peut avoir son éloquence, mais qui convient mieux aux luttes orageuses du barreau qu’à l’impartialité sereine de l’histoire. J’en dirai presque autant de saint Cyrille d’Alexandrie, grand, sublime dans ses Catéchèses, mais fougueux et violent dans ses réfutations triomphantes de Julien. Le poëte chrétien Prudence, dans son Apothéose, dessine quelques traits de la figure de Julien avec plus d’équité que d’élévation poétique, mais, comme il florissait au commencement du cinquième siècle, on sent qu’il s’éloigne déjà de la vérité contemporaine, ainsi que de la grâce et de la beauté littéraire. Pour terminer cette revue, il ne faut pas omettre Zonaras, Nicéphore Callistus, saint Jérôme, Théophane, Cédrénus et Suidas, qui nous donnent aussi quelques indications sur la vie et sur les ouvrages de Julien ; après quoi semble s’ouvrir désormais pour l’empereur le champ de l’histoire moderne et se dresser le tribunal de la postérité[1].

I.

L’avénement des trois fils de Constantin est écrit dans l’histoire en lettres de sang. Quelques jours après les funérailles de leur père, la famille Flavienne est égorgée, et c’est Constance surtout, exécuteur testamentaire de l’empereur défunt, que la

  1. Voyez, à la fin du volume, notre Index bibliographique.