Page:Julien empereur - Oeuvres completes (trad. Talbot), 1863.djvu/19

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postérité rend responsable de cette affreuse boucherie. Ce prince, si froid pour le bien, si faible dans ses résolutions, ne recula point devantr un crime qui lui assurait, ainsi qu’à ses frères, une tranquille possession du trône. Obéit-il àun ordre posthume, à un codicille secret de son père, une critique impartiale doit en douter, mais l’émeute militaire et le massacre général qui enveloppa ses deux oncles, sept de ses cousins et deux officiers de la couronne, sont des faits incontestés qui flétriront à jamais sa mémoire. En vain les eunuques et les flatteurs de Constance, devenu plus tard seul maître de l’empire, répandirent-ils le bruit qu’il avait éprouvé le plus violent chagrin de ces scènes d’horreur et regardé comme un châtiment du ciel de n’avoir point d’enfants et de faire aux Perses une guerre désastreuse ; le nom de bourreau de sa famille, que lui a infligé Julien, prévaudra contre les témoignages suspects de ces apologies intéressées.

Deux enfants avaient échappé au fer des soldats par les soins, dit-on, de Marc, évêque d’Aréthuse : c’étaient les fils d’un frère de Constantin de Jules Constance, homme doux et modéré, et l’une des plus illustres victimes de ce hideux carnage. L’aîné des orphelins n’avait pas treize ans. On le croyait atteint d’une maladie mortelle : on l’épargna. Julien, le second, âgé de six ans, dut son salut à son jeune âge. On les. cacha tous deux dans une église. Fils du même père, les deux frères avaient eu deux mères différentes. Gallus était né de Galla, femme de haute naissance. Julien était le fils unique de Basilina, fille du préfet Julien, riche sénateur, le premier peut-être qui ait fait profession publique de christianisme. Galla était morte, laissant à son mari une fille, et deux fils. Basilina, seconde femme de Jules Constance, n’avait survécu que quelques mois à la naissance de son unique enfant. C’est le 6 novembre de l’année 331 après Jésus-Christ, sous le consulat de Bassius et d’Ablavius, que Basilina avait mis au jour, dans la ville de Constantinople, le fils qui, suivant les usages des Latins, avait reçu, avec la dénomination commune à sa famille, le nom patronymique de son aïeul maternel : on l’appela Flavius Claudius Julianus : en français nous le nommons Julien.

La politique cauteleuse de Constance et de ses conseillers, qui avaient consenti à laisser vivre ses neveux adoptifs, prit des mesures pour que les deux frères fussent hors d’état de lui porter ombrage. On commença par les séparer. Gallus fut relégué à