Page:Juranville - La civilité des petites filles, Ed. 2.djvu/50

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
LA CIVILITÉ DES PETITES FILLES.

relie, gracieuse. Ah ! Marguerite, que je voudrais donc lui ressembler !

« Notre visite finie, nous saluons Mme Richer, puis les dames qui se trouvaient près d’elle, et nous retournons chez nous. Dans le chemin, je dis à Alice : « — Si tu as fait tant de frais de politesse chez Mme Richer, c’est parce qu’elle est une bourgeoise, une personne riche, n’est-ce pas ?

« — Quels frais ? J’ai été seulement convenable. Il faut l’être partout, il faut l’être toujours.

« — Quoi ! à la ferme où nous passerons demain la journée, tu seras aimable ainsi ?

« — Pourquoi pas ? Nous devons être de bonne compagnie à la ville et à la campagne.

«  En rentrant à la maison, ma cousine me dit tout en marchant : a Si le diamant a besoin d’être taillé pour avoir de l’éclat, nous, nous avons besoin de la politesse pour plaire et faire valoir nos qualités. Écoute cette petite fable que tu pourras copier :


LES DEUX DIAMANTS


Du sein de la même carrière
Nous sommes sortis tous les deux,
Disait un jour à son confrère
Un diamant tout raboteux.
Ma grosseur vaut celle d’un nuire,
Et mon prix, ce me semble, égale bien le vôtre.
Cependant nous avons un sort tout différent.
Chacun vous admire et vous prise,
Vous attirez sur vous les regards du passant,
Et moi, si l’on ne me méprise,
On me voit tout au moins d’un œil indifférent.
D’où vient donc cette différence ?
Et, tandis qu’avec vous j’ai tant de ressemblance,
Pourquoi suis-je partout moins loué, moins chéri ?
— C’est, lui dit l’autre alors, c’est que je suis poli.

Reyre.


≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈≈