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Page:Juranville - La civilité des petites filles, Ed. 2.djvu/72

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LA CIVILITÉ DES PETITES FILLES.


surcroît de dépense, elle fut vivement contrariée. Elle se dit en elle-même : — C’est là le plaisir des voyages avec Pierre ! Je ferai en sorte de n’en plus faire dans sa compagnie : c’est le premier et ce sera le dernier.

Le lendemain de ce jour, une autre mère voyageait avec ses deux enfants, Armand et Henriette ; mais ceux-ci étaient aussi raisonnables que Pierre l’était peu. Ils montèrent avec précaution dans le compartiment, saluèrent gentiment les voyageurs et s’assirent près d’eux.

Il y avait justement une dame tenant dans ses bras un bébé qui pouvait avoir huit à neuf mois, et bébé ne s’amusait guère en chemin de fer : il grognait et pleurait. Alors Armand, qui avait un polichinelle dans un panier, le retira, le montra à l’enfant et le fit manœuvrer à sa grande satisfaction.

Henriette avait du bonbon dans sa poche, elle donna un bâton de sucre d’orge au petit pleureur. Puis le frère et la sœur s’ingénièrent tout le temps de la route à amuser le bébé : ils frappaient dans leurs mains, le faisaient rire et l’embrassaient. Tous les voyageurs admiraient ces deux charmants enfants. Ils les questionneront et ils furent ravis de leur tenue, de leurs réponses et de leurs manières gentilles.

Une dame, placée près de leur mère, lui dit tout bas à l’oreille :

— Que je vous trouve heureuse d’avoir des enfants si aimables, j’envie votre sort !…

Et elle soupira douloureusement.

Il est bien probable que ses enfants à elle ne leur ressemblaient pas.

Lorsqu’on voyage avec des enfants polis et bien élevés, chacun cherche à leur faire plaisir ; on aime à jouir de leur babil, on s’intéresse à eux. En voyage, il ne faut pas se rendre incommode aux autres et chercher avant tout ses aises. Les enfants doivent ne gêner aucunement leurs voisins et ne parler que