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symbolistes et décadents

cerveaux, seuls en leurs Abolitions, et dont le devoir est de se créer sans cesse supérieurs par l’affinement de leurs désirs vers la pureté et l’idée. Ces gens d’élite portent dans leur âme le reflet des richesses stériles d’un grand nombre de rois oubliés (Souvenirs occultes) ; si vous élargissez le sens de cette phrase, vous aurez l’idée-mère d’Axel.

À cette constatation quasi désespérée dans sa noblesse, — à savoir qu’il n’est nul but que l’existence même, à condition qu’elle soit cérébrale, — pour adoucir le dur chemin solitaire, Villiers offre la foi, la foi en des êtres de limbes, semi-existants vers la limite du monde réel, fantômes de bonté, anges perceptibles à qui les peut apercevoir. « Impénétrable à des yeux d’argile, la face du messager ne peut être perçue que par l’esprit. Efflux et assises de la nécessité divine, les anges ne sont, en substance, que dans la libre sublimité des cieux absolus, où la réalité s’unifie avec l’Idéal. Ce sont des pensers de Dieu discontinués en êtres distincts par l’effectualité de la toute-puissance.

— Réflexes, ils ne s’extériorisent que dans l’extase qu’ils suscitent et qui fait partie d’eux-mêmes. »

Ces êtres de limbes apparaissent aux prédestinés, à ceux qui ont su garder le libre état de leur conscience et de leur sens, dans le sommeil, dans la vision, dans des minutes rares et brèves d’exaltation ; les contacts qu’ils font subir étant de nature toute spéciale, et n’engendrant que des vibrations tout intellectuelles, il faut, pour éprouver le choc et ne le point laisser passer comme une léthargique minute, y être préparé, pour le comprendre, il faut y avoir, dès l’abord, réfléchi.