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Page:Kant-Fondements de la métaphysique des moeurs, trad. Lachelier, 1904.djvu/95

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DEUXIÈME SECTION


l’ont réduit au désespoir, n’éprouve plus que du dégoût pour la vie, mais il est encore assez maître de sa raison pour se demander s’il peut, sans manquer à ses devoirs envers lui-même, attenter à ses jours. Il cherche alors si la maxime de son action peut devenir une loi universelle de la nature. Sa maxime est la suivante : J’admets en principe, par amour pour moi-même, que, si la vie, en se prolongeant, me menace plus de maux qu’elle ne promet de joies, je puis l’abréger. Je demande maintenant si ce principe de l’amour de soi peut devenir une loi universelle de la nature. Mais je m’aperçois bien vite qu’une nature dont la loi serait de détruire la vie, en vertu de ce même sentiment dont l’objet est précisément de nous exciter à la conserver, se contredirait elle-même et par suite n’existerait pas comme nature. La maxime en question ne peut donc en aucune façon être érigée en loi universelle et par conséquent elle répugne absolument au principe suprême du devoir.

2. Un autre se voit réduit parle besoin à emprunter de l’argent ; il sait bien qu’il ne pourra pas le rendre,

    droit, susceptibles de s’exprimer dans des lois (par exemple le respect de la vie et de la propriété d’autrui=, et Devoirs de vertu, non susceptibles de s’exprimer dans des lois. Les premiers sont des devoirs stricts, exigibles, donc parfaits, les seconds des devoirs larges, laissant une certaine latitude à notre initiative, non exigibles, donc imparfaits.
    Les devoirs de vertu se rapportent à nous-mêmes ou aux autres. Nous devons travailler à nous perfectionner (c’est-à-dire à développer les facultés qui font de nous des personnes morales, et à rendre les autres heureux. En effet, nous ne devons pas nous proposer le bonheur comme fin personnelle, ce serait retomber dans l’utilitarisme : d’autre part, ne pouvant pas perfectionner nos semblables, nous devons lâcher de leur procurer le bonheur, en pensant que le bonheur est une condition favorable à leur perfectionnement.
    Les devoirs personnels se divisent eu devoirs de l’homme envers lui-même en tant qu’animal, c’est-à-dire être physique, et devoirs de l’homme envers lui-même en tint que personne raisonnable.
    Les devoirs envers nos semblables se classent en devoirs d’amour (par exemple être bienfaisant) et devoirs de respect (par exemple ne pas mépriser, calomnier, etc., autrui).