Page:Kant-Mélanges de Logique (trad. Tissot), 1862.pdf/346

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par ce que nous devons juger. Car l’usage pratique pur de la raison consiste dans la prescription des lois morales. Or ces lois conduisent toutes à l’idée du bien suprême, qui est possible dans le monde, en tant seulement qu’il est possible par liberté, à la moralité. D’un autre côté elles conduisent aussi à ce qui ne regarde pas seulement la liberté humaine, mais encore la nature, à savoir, la plus grande félicité, autant qu’elle est proportionnée à la moralité. La raison a donc besoin d’admettre cette espèce de souverain bien dépendant, et comme garantie de ce bien une intelligence suprême à titre de bien souverain indépendant, non pas il est vrai pour en dériver l’autorité obligatoire des lois morales, ou les mobiles de leur observation (car elles n’auraient aucun prix si leur mobile était dérivé d’autre chose que de la loi seule, qui est apodictiquement certaine en soi) ; mais seulement pour donner à la notion du souverain bien une réalité objective, c’est-à-dire pour empêcher qu’il ne soit regardé avec toute la moralité comme un pur idéal, s’il n’existait nulle part une chose dont l’idée accompagne indissolublement la moralité. Ce n’est donc pas une connaissance, c’est un besoin senti[1] de la raison, par lequel Mendelssohn s’orientait

  1. La raison ne sent pas ; elle aperçoit ce qui lui manque, et le sentiment agit par le mobile de la connaissance. Il en est ici comme da sentiment moral, qui ne donne aucune loi morale ; car cette loi sort tout entière de la raison ; mais il est causé ou opéré par des lois morales, par conséquent par la raison, parce que la volonté, excitée et cependant libre, a besoin de principes déterminés.