Dans ce cas, la raison tient toujours les rênes, et l’enthousiasme de la bonne résolution est opéré, mais il doit être positivement attribué à la faculté appétitive et non à l’émotion, comme sentiment physique supérieur.
Le don naturel d’une apathie compatible avec une force d’âme suffisante, est, comme on l’a dit, flegme heureux (dans le sens moral). Celui qui en est doué n’est pas précisément un sage, mais il a cet avantage naturel de pouvoir le devenir plus facilement qu’un autre.
En général, ce n’est pas la force d’un certain sentiment qui constitue l’état d’émotion ; c’est le défaut de réflexion, qui ne permet pas de comparer (dans un état donné) ce sentiment avec la somme de tous les sentiments (de plaisir ou de peine). Le riche auquel son serviteur casse, par maladresse, un vase de cristal d’une beauté rare, ne tiendrait aucun compte de cet accident s’il comparait cette perte d’une seule jouissance avec la multitude de tous les agréments que lui procure son heureuse situation de fortune. Mais il s’abandonne tout entier à ce sentiment de douleur (sans faire promptement ce calcul dans sa pensée) ; est-il donc étonnant qu’il prenne la chose aussi à cœur que si toute sa fortune était perdue ?