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CRITIQUE DU JUGEMENT ESTHÉTIQUE

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CRITIQUE DU JUGEMENT ESTHÉTIQUE,

convenance même qu’ils nous font découvrir entre la raison et l’imagination considérée dans sa plus grande extension. N’oublions pas ici la remarque que nous avons déjà faite, à savoir que, dans l’esthétique transcendantale du Jugement, il ne doit être question que des jugements esthétiques purs, et que par conséquent les exemples ne peuvent pas être empruntés aux objets beaux et sublimes delà nature qui supposent le concept d’une fin, car alors la finalité serait ou téléologique ou fondée sur de simples sensations causées par un objet (le plaisir ou la douleur), et elle ne serait point par conséquent, dans le premier cas, purement esthétique, dans le second cas, purement formelle. Quand donc nous appelons sublime la vue du ciel étoilé, nous n’avons pas besoin, pour le juger ainsi, de concevoir des mondes habités par des êtres raisonnables et de considérer les points lumineux dont nous voyons l’espace rempli au-dessus de nous comme les soleils de ces mondes, se mouvant dans des cercles parfaitement appropriés à ces derniers ; il suffit de le voir tel qu’il nous apparaît, comme une immense voûte qui embrasse tout ; et ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons lui attribuer la sublimité, qui est l’objet d’un pur jugement esthétique. De même pour trouver sublime la vue de l’océan, nous ne nous le représentons pas tel que le conçoit un esprit enrichi de toutes sortes de con-